L’album rap que j’attendais avec impatience. Enfin dans les bacs et heureux de l’avoir dans mes mains en sortant de chez le disquaire. Pour la petite anecdote, je ne l’ai même pas écouté avant de l’acheter car très confiant sur le taf de ce emcee du 93 au flow très particulier et incisif. Très satisfait de cette décision, je savais que je n’allais pas être trompé sur le « produit ».
Le rappeur Despo Rutti a sorti le 26 Avril son premier album intitulé Convictions Suicidaires. Après avoir convaincu notamment avec son street album Les Sirènes du Charbon sorti en 2006, il continue dans sa lancée et son style cru et franc avec ce nouvel album au titre certes sombre mais décrivant parfaitement l’ambiance et l’univers de cet artiste.
Despo marque par son écriture brute et réfléchie, remplie de simples vérités souvent non assumées par la morale collective, une démarche pleine de bon sens où l’on ressent parfois une agressivité qui peut déranger, mais là serait justement l’objectif de Despo. Déranger pour faire réfléchir.
« Si la politesse est la forme d’hypocrisie la plus respectable, j’ai du mal à rester calme »
Toujours signé sur le même label Soldats Sans Grade, Convictions Suicidaires est une mine sur le sol du rap français.
« On est mieux que les mines antipersonnel après réflexion posée, Soldats sans Grade n’acceptera jamais de se faire marcher dessus pour exploser »
Les morceaux sont détonants, mettent à plat les problèmes de la vie sociale et du quotidien, sans pour autant trop facilement se focaliser sur le combo « cité, misère, immigration, nique sa mère la police ». Il analyse d’abord les relations et réactions humaines en France, en dénonçant bien entendu les injustices et surtout les contradictions et les absurdités de ce pays, qui mènent au fossé grandissant entre riches et miséreux, et dans une plus large mesure, de l’Homme, cette « sale race ». Du racisme entre noirs et maghrébins dans le titre L’Oeil aux Beurs Noirs à la lutte au sein de la dure industrie de la musique dans Underground Music, les thèmes de Despo sont larges, et emmenés certes sans optimisme mais dans un élan combatif.
Que dire de la production musicale ? A la direction artistique, Despo himself et de grosses instrus proposées notamment par Dj Boudj, Zeano ou encore Kilogramme, celles m’ayant le plus marquées s’écoutent dans les morceaux Convictions Suicidaires, L’Oeil aux Beurs Noirs, Innenregistrable. Redemption ou encore Trashhh, titre que l’on retrouve par ailleurs dans la mixtape Autopsie Vol.3 de B2O.
« Un solitaire comme moi qui saigne, quand on lui tend la main, il vérifie si elle est plus propre que la sienne »
Un album très bien travaillé, varié, brut, sincèrement une réussite musicale et j’invite même les réticents au rap à écouter, au moins pour les textes.
» Je dirais à ma belle-mère raciste qui me traite de singe, qu’est ce qui est pire, être agile ou avoir accouché d’une fille zoophile ? »
On termine en image avec le clip de Légitime Défense:
Et puis on revient dans le temps avec le clip de Arrêtez, excellent morceau issu des Sirènes du Charbon: