Kanye West – 808s & Heartbreak
Mon premier avis sur cet album n’était pas aussi clair. Je suis passé en plusieurs étapes, du « c’est quoi ce son ? » à « j’aime pas » (avec les premiers morceaux sortis au compte-goutte sur le web), puis « je suis mitigé sur l’album » à « j’adore et iTunes ne sait plus lire que ça en ce moment« . La bascule du rejet à l’adhésion à cet opus se traduira en trois étapes.
Step 1 : Hip Hop saved my life
En tant que fan de hip hop et des premiers albums de Kanye West, la première réaction sur les premiers sons dispersés sur le web a été plutôt répulsive. Qu’est-ce que l’homme qui a révolutionné la production du hip hop nous fait avec son auto-tune ? Pourquoi veut-il remplacer T-Pain ou Lil Wayne ? Qu’est ce que ce son ? Le problème était là ; les morceaux de cet album sont des OVNI, sans étiquettes. Les influences viennent de partout (Kanye a raconté avoir écouté beaucoup de Boy George, Phil Collins, George Michael entre autre pendant l’enregistrement de l’album) et s’éloignent volontairement de ces sons soulful que Kanye utilisait pour ses anciennes productions.
Finalement, je fus dérouté par le virage à 180° des prods de Kanye. Je voyais parfaitement l’évolution des instrus présentes sur le « Blueprint » de Jay-Z (« Izzo », « Never changes », « Heart of the city (Ain’t no love) » aux morceaux de Graduation (du superbe « I wonder » à « Flashing lights« ). Le rejet initial de cet album était donc expliqué par la déception de ne pas entendre les types de sons de Kanye qui m’ont tant marqués. Ma première écoute de « Robocop » ou de « Heartless » ne me laissait présager rien de bon pour ce quatrième album. Et pourtant …
Step 2 : Touch the sky
Cette orientation représente, pour Kanye, finalement une recherche d’universalité dans sa musique. Mr West veut devenir le nouveau Michael Jackson, « the New King of Pop » et surtout ne plus être catalogué en tant que rappeur (cf interview dans Fader Magazine).
Toutes proportions gardées, on peut approfondir en comparant avec le parcours de TTC. Fer de lance de l’underground hip hop, ils ont démarré avec « Bâtards sensibles » et poursuivit avec « 3615 TTC », cette quête de la mélodie pop parfaite (pop dans le sens de populaire). Ils ont voulu toucher un public plus vaste et plus diverse, être connu. L’ascencion fulgurante de Kanye rejoint celle du crew français (toutes proportions gardées bien entendu).
Le talent incontestable de Kanye (accompagné à son égo démentiel) le guide vers un autre avenir. Si le succès continue de lui coller à la peau tout en poursuivant la création de productions jamais entendus, il remportera son pari : faire parti des Michael Jackson, Madonna, Phil Collins ou Prince c’est-à-dire des Mythes de la musique. « Petit Kanye deviendra grand », il souhaite passer ainsi du statut de producteur underground que tout le monde s’arrache à celui d’artiste hip hop incontournable pour devenir prodige visionnaire de la musique. Cet émancipation fait résonner les paroles de « I wonder » … « And I wonder, if you know, what it means, to make your dreams come true« .
Une fois que j’avais pu faire l’effort de le déclasser des artistes hip hop, de passer au-dessus de l’abus d’auto-tune, j’ai commencé à apprécier cet album et en découvrir ses pépites. Le tubesque « Love lockdown » réussit à mélanger la force de percussions rythmées avec la beauté du piano. « Street lights » est dans la lignée des grands tubes pop de Coldplay. Je ne suis pas particulièrement friand de Coldplay mais dans les mains de Kanye, il y met un je ne sais quoi qui rend le titre imparable. Personnellement, le titre le plus visionnaire et représentatif de cette nouvelle forme de hip hop est « Paranoid« . Le morceau produit est une véritable bombe qui fait remuer les fessiers et bouger les têtes.
Step 3 : Everything I Am
Mon affection pour cet album vient également du fait que l’introspection de Kanye sur « 808’s & Heartbreak » dépasse celle des précédents opus. En effet, ce disque a un rôle thérapeutique pour la star. Il a perdu sa mère l’an dernier, quelques jours avant sa date parisienne au Zénith (j’ai encore en tête l’instru de « Hey mama » qui démarre, le public qui le soutient et Kanye qui ne peut pas interpréter le morceau) et il a également rompu avec sa girlfriend. C’est donc un Kanye perturbé qui se livre au fil des 12 chansons.
Annexes :
Wow! Il est fat cet article! Super complet, intéressant, une vraie contribution au débat acharné qui se met en place là dessus. Je suis plutôt de ton avis globalement même si je suis un peu moins enthousiaste.
C’est trop la classe en fait d’être dans les annexes d’un billet d’une telle qualité. ^^
Et bon anniv à la Jubox! J’attends de voir la suite et fin des célébrations. 😀
(et je devrais aussi me pencher sur la fiche idée, je sais ^^)